28/07/22 3 questions à

Silence, ça tourne !

Hautement cinématographique, l’aéroport de Paris-Charles de Gaulle accueille depuis toujours de nombreux tournages, du long-métrage au spot de publicité. Une trentaine de projets sont tournés en moyenne chaque année, nécessitant en amont un important travail de préparation pour l’équipe d’Anne Robert, responsable de la communication opérationnelle de Paris-Charles de Gaulle, qui nous en dévoile les coulisses.

Tournage du film Plancha à Paris-Charles de Gaulle ©Céline Bianchi Galeuzzi

Tournage du film Plancha à Paris-Charles de Gaulle ©Céline Bianchi Galeuzzi

Responsable de la communication opérationnelle, Anne Robert supervise les tournages à Paris-Charles de Gaulle et Paris-Le Bourget. Avec les membres de son équipe, Céline Bianchi et Carole Boilot, elle s’assure que rien n’entrave le bon déroulement des tournages avec un travail logistique en amont pouvant aller jusqu’à plusieurs mois.

Combien de tournages accueillez-vous chaque année à Paris-Charles de Gaulle ?

Nous accueillons une trentaine de projets par an, cela varie en fonction des années, du long métrage au micro-projet. Un long métrage par exemple nécessite trois ou quatre mois de préparation pour mon équipe, et nous avons deux ou trois tournages par mois à Paris-Charles de Gaulle.
Les demandes sont diverses. Nous avons de plus en plus de séries avec le développement des plateformes comme Netflix, Amazon ou OCS, beaucoup de films, mais aussi quelques publicités. Récemment, Puma a tourné une publicité dans le Terminal 1, fermé pour travaux depuis 2020. Nous avons profité de sa fermeture, car tourner avec des passagers, c’est plus complexe. Beaucoup de réalisateurs aiment ce terminal, construit dans les années 70, son côté vintage, ses tubes centraux devenus iconiques. A l’inverse, quand un bâtiment est fermé, vous avez moins d’éléments visuels, les écrans sont éteints… Mais avec la magie du cinéma, les équipes arrivent avec la déco, la lumière, et on réussit à tourner sans souci !

« Beaucoup de réalisateurs aiment le Terminal 1 pour son côté vintage, ses tubes centraux devenus iconiques. »

Comment s’organise la venue d’un tournage ?

Le premier contact est établi par le régisseur général, le chef d’orchestre logistique du tournage, qui a des demandes de dates très rarement flexibles. Le rendez-vous de repérage se fait avec le premier assistant de mise en scène, parfois le réalisateur, les équipes techniques, de déco. Nous demandons aussi à lire le scénario car nous ne voulons pas permettre des tournages contraires à notre déontologie de respect de nos compagnies aériennes, de nos partenaires comme la police de l’air ou des frontières, la préfecture. Une fois le repérage fait, nous savons combien de temps l’organisation nous prendra. Rien que pour les délais administratifs, il faut compter cinq semaines.

30

c’est le nombre de projets tournés à Paris-Charles de Gaulle en moyenne par an

Quelles sont les contraintes liées au tournage dans un aéroport comme Paris-Charles de Gaulle ?

Notre équipe est là pour accueillir les équipes dans les meilleures conditions pour que la production n’y voit que du feu alors que nous avons énormément de contraintes liées à la sûreté, à la sécurité, aux passagers… On va trouver des lieux dans lesquels on peut tourner aux bonnes heures. Il y a un très gros volet logistique sur un tournage, notre équipe est dédiée à favoriser le passage des camions, des techniciens, des figurants, à sécuriser le tournage, en accord avec la préfecture et les autorités de police. On s’occupe aussi des plans de prévention, du dossier technique pour la préfecture détaillant tout le matériel, le plan d’occupation des scènes, par exemple. Une fois tout cela validé, on peut tourner. Cela se passe sur plusieurs mois de préparation.

« Notre équipe est là pour accueillir les équipes dans les meilleures conditions pour que la production n’y voie que du feu. »

Pouvez-vous nous parler de tournages récents ?

Nous venons d’accueillir l’équipe du prochain film d’Olivier Nakache et Eric Toledano pendant cinq jours pleins. A Paris-Charles de Gaulle, nous avions une centaine de figurants sur des postes d’inspection filtrage, des acteurs en agent de sûreté. On recréait des scènes d’aéroport mais c’était de la fiction, avec un périmètre de sécurité par rapport aux vrais passagers. Nous avons également tourné sur la piste, avec un comédien dans le rôle de livreur de bagages, de nuit, avec des images splendides de la jetée du Terminal 2, hall K. Il y a aussi une scène avec quarante taxis pour créer un embouteillage.

Tournez-vous toujours aux mêmes endroits ?

Au contraire, c’est toujours intéressant de se challenger et de ne pas proposer les mêmes lieux pour que l’on ne voit pas la même chose dans les différents films. On se rend compte que l’aéroport regorge d’endroits inspirants. Puma par exemple a détourné les tubes du Terminal 1 pour en faire des couloirs menant à une station spatiale en clin d’œil au Cinquième Élément de Luc Besson. C’est un double hommage au film et au terminal qui était futuriste lorsqu’il a été créé il y a quarante ans ! Nous pouvons proposer aussi des accès routiers, nous nous adaptons, on essaie de se renouveler à chaque fois. C’est intéressant de suivre l’évolution d’un aéroport.

Peut-on dire que l’aéroport est un lieu particulièrement cinématographique ?

Nous accueillons des projets très différents. Récemment, un photographe de la Fondation Yves Saint Laurent est venu avec deux mannequins pour des prises de vue avec le projet d’une exposition concomitante dans plusieurs endroits au monde. C’est un projet artistique, l’aéroport est un lieu très inspirant pour les artistes. Dans le même esprit, des magazines comme ELLE ou Madame Figaro organisent régulièrement des grandes séries mode à Paris-Charles de Gaulle. Nous avons des lieux très qualitatifs, le voyage inspire toujours les rédacteurs de mode.

« L’aéroport est un lieu très inspirant pour les artistes. »

Vous souvenez-vous de tournages particulièrement marquants ?

Nous avons accueilli Clint Eastwood en 2018 en tant que réalisateur pour son film sur les attentats du Thalys, Le 15h17 pour Paris. Il devait tourner à Bruxelles, mais il a souhaité venir à Paris-Charles de Gaulle. Il a fallu reconstituer la signalétique comme si nous étions à l’aéroport de Francfort… C’était Clint Eastwood, on s’est autorisé un écart de marque !

Nous avons aussi fait une belle rencontre avec Claude Lelouch, Jean Dujardin, Elsa Zylberstein pour le film Un Plus Une. C’était peu de temps après The Artist, il a fallu travailler avec la police pour éloigner les badauds.

C’est à cela que l’on sert, on prévoit tout, la production ne se rend pas compte des efforts faits, mais tout est blindé, vérifié avant le tournage, pour s’assurer que tout fonctionne.

Nous avons aussi eu la chance d’accueillir Sigourney Weaver sur le tournage de Dix pour cent, Yvan Attal pour Les Choses humaines avec Charlotte Gainsbourg et leur fils Ben… Mais on fait aussi des courts-métrages, des premiers films… On ne choisit pas que des stars ! A chaque fois, on s’attache aux équipes avec qui on passe beaucoup de temps. Humainement ce sont des rencontres qui peuvent être très riches !

Nous sommes aussi très heureux « d’avoir eu » deux prix à la Mostra de Venise pour Laure Calamy et le réalisateur du film A Plein Temps, Eric Gravel, dont des scènes ont été tournées à Paris-Charles de Gaulle.

« On fait aussi des courts-métrages, des premiers films. On ne choisit pas que des stars ! »

Des tournages sont-ils prévus cet été ?

Nous allons accueillir Dany Boon en juillet pour son prochain film. En août, nous n’accueillons pas de tournage, car il y a trop de passagers, mais d’autres sont déjà prévus pour la rentrée.

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