30/03/21 3 questions à

A Paris-Orly, des roseaux pour filtrer l’eau

Saviez-vous que Paris-Orly disposait d’un marais filtrant ? Ce système de bio-épuration, respectueux de l’environnement, filtre les eaux de ruissellement, et traite notamment les produits contre le givre et le verglas contenus dans les eaux pluviales. Laurence Faure, directrice du Process technique et Bagages, et Marc Boufflers, responsable Énergies et Réseaux, nous expliquent.

Marais filtrant

Marais filtrant

Jusqu’à cinq millions de m3 d’eaux de ruissellement sont collectés et traités chaque année à Paris-Orly par le système de traitement des eaux pluviales (STEP de l’aéroport). En 2014, ce dispositif a été complété par un marais filtrant de 6 500 m², capable de traiter rapidement la pollution des eaux qui le traversent, et de manière complètement naturelle.

Laurence Faure – directrice du Process Technique

Cela fait plus de 25 ans que Laurence Faure travaille comme ingénieure au sein du Groupe ADP, où elle a occupé de multiples fonctions, entre Paris-Orly et Paris-Charles de Gaulle.

Forte de cette expérience, elle a pris la direction Technique et Bagages de Paris-Orly en juin 2020.

Marc Boufflers travaille pour le Groupe ADP depuis 2002. D’abord responsable Projets techniques pour la direction de l’Ingénierie et de l’Architecture, puis responsable Énergie sur la plateforme de Paris-Charles de Gaulle, il a rejoint la direction technique de Paris-Orly en 2018 pour prendre en charge le pôle Énergies et Réseaux.

Il peut compter sur une équipe d’une cinquantaine de personnes pour gérer la distribution d’énergie sur l’ensemble de l’aéroport et assurer le bon fonctionnement du cycle de l’eau.

Comment fonctionne le système de traitement des eaux pluviales (STEP) de Paris-Orly ?

Laurence Faure :

A Paris-Orly, nous disposons de 600 ha imperméabilisés sur lesquels tombent d’impressionnants volumes d’eau lors de fortes pluies. L’objectif du STEP est de faire en sorte que toutes les eaux qui traversent notre aéroport en ressortent claires, avant d’être rejetées dans L’Orge, la rivière voisine.

Pour cela, le STEP fonctionne en plusieurs étapes. Quand la pluie tombe, l’eau ruisselle sur le béton et lave nos pistes, qui contiennent parfois des produits de traitement hivernaux ou du carburant.

Paris-Orly est doté d’un réseau de 150 km de canalisation permettant d’acheminer les eaux pluviales jusqu’à la station : l’eau est ensuite pompée dans un puits, puis acheminée  dans des systèmes de filtrations successifs.

L’eau transite ainsi dans un dessableur, puis elle passe dans un bassin biologique où des bactéries mangent le carbone organique présent dans l’eau, avant d’être affinée dans notre marais filtrant, où des roseaux assurent l’épuration finale.

C’est là toute la particularité de notre système : la dépollution se fait en cascade, chaque étape complète la précédente dans un ordre bien précis.

50 bassins olympiques

c’est la contenance de deux lagunes où les eaux polluées peuvent être stockées avant d’être traitées.

Les épisodes d'orages intenses peuvent conduire au remplissage des deux lagunes en une heure

Marc Boufflers

Le marais filtrant est composé de pieds de roseaux plantés dans un lit de sable. On y déverse les eaux sorties du bassin biologique, encore légèrement chargées en carbone organique. Les plantes s’en nourrissent, oxygénant ainsi le filtre minéral constitué par le sable, qui va finir la dépollution.

Toutes ces étapes sont importantes car elles permettent à l’eau rejetée dans L’Orge de conserver les bonnes caractéristiques, en particulier d’oxygénation, nécessaires à la vie des poissons : nous monitorons à chaque étape de la chaîne les caractéristiques de l’eau pour nous assurer en permanence de la bonne qualité de l’eau rejetée, conformément à la réglementation.

Carbone organique ?

Le carbone organique, ou plus précisément carbone organique total (COT) est un paramètre de la chimie de l’eau utilisé pour suivre la pollution des milieux aquatiques.

Schéma du système de traitement des eaux pluviales de Paris-Orly (Source : Groupe ADP)

Qui est responsable de la propreté des eaux pluviales de Paris-Orly ?

Laurence Faure :

Le Groupe ADP garantit la clarté des eaux qui ressortent de l’aéroport.

L’ensemble des acteurs de la plateforme jouent un rôle dans la qualité des eaux recueillies en amont du STEP et permettent ainsi de contribuer à son bon fonctionnement.

« La clarté des eaux est notre responsabilité, mais c’est aussi l’affaire de tous. »

Marc Boufflers :

Nous avons confié l’exploitation du STEP à  Suez qui est l’opérateur de l’ensemble du système, dont le marais filtrant. La maintenance de ce dernier est très simple, et consiste en une coupe annuelle et des remplacements par endroits de pieds de roseaux. Suez la sous-traite à un spécialiste main-verte.

Laurence Faure :

Au-delà du marais filtrant, Suez assure la maintenance et l’exploitation de l’ensemble de l’installation et son amélioration permanente en collaboration avec les équipes de Marc. Cette activité nécessite une présence et une vigilance 7 jours sur 7, 24h sur 24.

Qu’est-ce qui conduit un aéroport à choisir un système de traitement des eaux pluviales plutôt qu’un autre ?

Laurence Faure :

La question du traitement des eaux pluviales est commune à tous les aéroports du monde, mais les choix techniques et technologiques de chacun sont corrélés aux contraintes et opportunités données par la typologie du lieu où ils se situent.

Par exemple, Paris-Charles de Gaulle fonctionne avec la même logique de traitement des eaux que la nôtre, mais ne possède pas de marais filtrant. Il exploite un système légèrement différent, son terrain n’ayant pas les mêmes spécificités et exutoires possibles. L’aéroport est beaucoup plus grand, mais le cours d’eau dans lequel sont rejetées les eaux traitées est un tout petit effluent au débit très faible, la Réneuse. Il est donc primordial ici de contrôler les quantités d’eau qui arrivent en station d’épuration avant qu’elles ne soient déversées dans la nature. Pour cela, Paris-Charles de Gaulle a mis en œuvre des capacités de stockage d’eau très importantes, 10 à 15 fois supérieures à celles de Paris-Orly, lui permettant de faire de la rétention en amont.

Le système de Paris-Orly est possible car L’Orge a des capacités d’absorption adéquates, qui nous ont permis de faire le choix de ces traitements en séquence : désableur, bassin biologique  et marais filtrant.

Ce sont des investissements importants, que nous faisons dans la durée. Mis en place en 2014, nous continuons d’améliorer ce système naturel avec de nouvelles infrastructures, pour toujours mieux répondre aux exigences environnementales que nous nous sommes fixées, réduire notre empreinte écologique et contribuer au développement durable de l’aéroport.

1,6 millions d’euros par an

cela représente les coûts de fonctionnements annuels du STEP

Quels sont les bénéfices du marais filtrant pour Paris-Orly et les riverains ?

Marc Boufflers :

Avec la double mise en place du bassin biologique et du marais filtrant, notre nouveau système nous a permis de diviser par deux la charge en carbone organique de l’eau que nous rejetons dans L’Orge. Ce système a donc fait ses preuves en en assurant la bonne qualité des eaux rejetées.

Laurence Faure :

Au-delà du marais filtrant et du système de traitement des eaux pluviales, c’est l’ensemble du mécanisme que met en place Paris-Orly qui est intéressant. Il y a une corrélation évidente entre la biodiversité et la qualité de nos eaux, une complémentarité à laquelle travaille au quotidien Paris-Orly.

Comment souhaitez-vous faire évoluer ce système ?

Marc Boufflers :

Au niveau du STEP, nous voulons continuer à améliorer la qualité des eaux qui sortent de notre station, et mieux les recycler pour nos process industriels (système incendie, système de refroidissement), mais également comme eau sanitaire dans les blocs sanitaires mis à disposition des passagers dans les terminaux…

Par ailleurs, nous travaillons sur une gestion plus dynamique des flux, et une meilleure rétention de l’eau en amont afin de mieux lisser les traitements.

Laurence Faure :

À l’échelle de l’aéroport, notre principal défi est de diminuer au maximum notre empreinte écologique. Pour cela, nous avons deux façons de faire : diminuer la quantité d’eau que nous utilisons pour nos activités industrielles et réemployer les eaux dépolluées qui sortent du STEP.

Dans ce sens, diverses expérimentations sont mises en place, à l’instar de celle que nous appelons le Pilote boue et dont le but est de créer du compost avec la boue récupérée dans le réseau du STEP lors des opérations de maintenance. Une matière écologique que nous pourrions partager avec le voisinage au bénéfice du territoire.

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